Maison du XVIIeme siècle

Etude de cas

par Laurent Martineau4 décembre 2022 18:49

Cette étude illustre la façon d'aborder un problème de rénovation thermique avec Archimist. Elle repose sur un cas réel. L'habitation objet de l'étude est un logis du XVIIeme siècle, de 260 m2 sur deux étages.

Le premier étage est en cours de rénovation, et les propriétaires souhaitaient optimiser le RDC, afin qu'il puisse être habité le plus tôt possible. L'habitation a donc été modélisée dans sa totalité, mais l'investissement s'effectue en deux temps: le RDC d'abord, puis le premier étage lorsque les travaux de rénovation le permettront. C'est l'étude du RDC que nous vous présentons ici.

Le plan du RDC est représenté ci-dessous:

 

Plan du RDC

Plan du RDC

 

Les contraintes

Dans les rénovations de maisons anciennes, la conservation des éléments d'architecture constitue souvent une contrainte pour l'amélioration énergétique. Dans notre cas, il fallait si possible:

  • Conserver tels quels les murs en pierre, à l'intérieur et à l'extérieur
  • Conserver les cheminées (au nombre de 4, deux au RDC, deux à l'étage)
  • Conserver la dalle du sol du RDC, refaite récemment en béton, malheureusement non isolée.
  • En revanche, il nous était possible d'agir sur l'isolation des plafonds intermédiaires et de la toiture, et d'habiller le sol de certaines pièces.

La maison ne disposait pas de système de chauffage autre que les cheminées du RDC et de l'étage, qui bien sûr étaient inutilisables dans l'optique d'optimisation que nous nous étions fixé (les cheminées sont des cheminées du XVIIeme de 2m de large par 1,5 m de haut environ).

Les murs de l'habitation sont très épais. En pierres calcaires fermes, leur épaisseur varie de 0,4 à 0,9 m selon leur rôle. Ils sont en général plus épais à leur base qu'en hauteur. Le plancher qui sépare le RDC du premier étage est un plancher en bois sur poutres anciennes. La toiture, quant à elle, a été refaite en tuiles mais n'est pas isolée. Le premier étage et les combles sont ouverts à tous les vents, et le resteront jusqu'à la rénovation complète du premier étage.

 

Les objectifs

Les propriétaires nous ont demandé de leur proposer la solution de chauffage / isolation qui soit la plus efficace et la moins coûteuse. L'investissement devait être le plus faible possible, ou étalé dans le temps.

 

Comment aborder le problème?

En l'occurrence, il n'était pas nécessaire de simuler la situation actuelle pour s'apercevoir qu'il est impossible de chauffer correctement la maison avec les cheminées. Par contre, la contrainte de conservation des cheminées nous a incité à chercher à les réutiliser. Nous avons donc commencé par évaluer une solution où le chauffage du RDC était assuré par des inserts.

 

Premier scénario : des inserts à pellets dans les deux cheminées du RDC

Les inserts à pellets modernes présentent l'avantage d'un excellent rendement (de l'ordre de 90%) et d'un bon niveau d'autonomie. Leur coût varie en fonction de leur qualité de fabrication et de leur puissance de chauffe. Les simulations effectuées avec Archimist nous ont permis de dimensionner la puissance des deux inserts, placés aux deux extrémités de la maison, dans le salon et la cuisine (voir figure précédente), pour obtenir une température moyenne dans ces pièces de l'ordre de 20°C.

La chambre, le vestibule, et la salle de bains étaient en cours d'aménagement lors de notre étude, ce qui nous a permis, après quelques simulations, de préconiser des travaux d'isolation: les cloisons de la salle de bains, ainsi que son plafond et le plafond du vestibule ont été isolés avec une couche de 10 cm de laine de verre. Le plafond de la chambre a reçu 30cm de laine de verre, alors que le sol de la chambre a été isolé par un polystyrène de 4 cm et un parquet en sapin. 

Les propriétaires disposaient d'un radiateur électrique à bain d'huile, que nous avons utilisé pour chauffer la chambre, en appoint des inserts. Ce qui représente un investissement nul.

La question s'est ensuite posée, de savoir s'il était judicieux d'isoler le plafond du RDC, en attendant que le premier étage soit opérationnel. En effet, à terme, le premier étage sera chauffé, et l'isolation RDC / premier peut sembler superflue. C'est vrai, à ceci près que l'isolation entre étages permet de mieux dimensionner et répartir les puissances de chauffe. Il a été décidé de réaliser cette isolation si le temps de retour sur investissement de l'isolation était inférieur à 5 ans (durée des travaux du premier). Le diagramme ci-dessous compare les courbes de coût avec isolation (en rouge) et sans isolation (en bleu):

Comparaison coûts avec et sans isolation

Courbes de coût des deux scénarios (version Archimist Premium)

 

Le temps de retour sur investissement s'établit aux alentours de deux ans et demi, l'opération est donc rentable dans les cinq ans (gain d'environ 1000 €) et permettra plus tard de mieux répartir les puissances de chauffe entre étages.

 

Deuxième scénario: avec un peu de manutention on peut mieux faire !

L'inconvénient principal des inserts à pellets, c'est leur prix: environ 4000 € par insert. Il est possible de les remplacer par des inserts traditionnels à bûches, qui certes demandent plus de manutention, mais représentent un investissement moins important (environ 1000€ pièce). Les inserts à bûches ont des rendements inférieurs aux inserts à pellets, mais les bûches coûtent moins cher que les pellets, et la question se pose donc de savoir ce qui est le plus intéressant. Les figures suivantes montrent les résultats de simulation, en rouge les bûches, en bleu les pellets : 

 

Retour sur investissement pellets - bûches

 

Investissements pellets - bûches

Coûts annuels pellets - bûches

Diagrammes de comparaison bûches / pellets (version Archimist Premium)

 

Les inserts à bûches sont nettement plus avantageux, à la fois en termes d'investissement et de coût de fonctionnement. Le montant investi dans les inserts à bûches est de 2000€, contre environ 8000 € pour les inserts à pellets. Les coûts d'électricité sont les mêmes pour les deux scénarios, ils correspondent au fonctionnement des radiateurs électriques de la chambre et de la salle de bains.

Les inserts à bûches présentent cependant des inconvénients : il faut manutentionner les bûches. C'est envisageable pour le RDC, à condition que les inserts aient une bonne autonomie, mais cette solution pourra difficilement être étendue aux cheminées du premier étage, plus tard. Par ailleurs, puisque les inserts doivent être alimentés régulièrement en bûches, il sera impossible de chauffer l'habitation en cas d'absence prolongée.

 

Troisième scénario : supprimer les inconvénients des bûches !

Pour aller plus loin, il faut changer de principe de chauffage et envisager une solution automatique, basée sur un système centralisé. Nous ne nous faisons guère d'illusion sur la performance d'un système de chauffage central au fuel, mais ce système a pour nos propriétaires un avantage majeur: il est facile de trouver du matériel d'occasion à bas prix. En effet, de nombreuses personnes se débarrassent de leur chauffage fuel pour installer une pompe à chaleur ou un autre dispositif plus performant, et sponsorisé par l'état. Une chaudière fuel à basse température ou à condensation récente se trouve facilement sur le marché de l'occasion pour 500 €, et il est facile de récupérer des radiateurs anciens en fonte, et de les reconditionner. Mais le fuel a des inconvénients que tout le monde connait, le premier étant son prix.

Nous avons simulé un système de chauffage central au fuel, élaboré à partir d'éléments d'occasion, et l'avons comparé au système à inserts bûches. Les résultats sont représentés sur la figure suivante:

 Comparaison fuel bûches

Comparaison fuel / bûches (version Archimist Premium)

 

A investissement quasiment équivalent, le fuel génère un surcoût d'environ 18000 € au bout de 10 ans, et ceci avec l'hypothèse peu probable d'une stabilité des prix du fuel. Le fuel n'est pas la solution.

Deux autres systèmes ont été testés, l'un basé sur une pompe à chaleur air / eau alimentant un réseau de radiateurs à basse température, et l'autre mettant en oeuvre une chaudière à pellets alimentant, elle aussi, un réseau de radiateurs à basse température. La figure suivante montre l'installation de chaudière à pellets:

 Schéma d'installation chaudière à pellets

Schéma d'installation d'une chaudière à pellets

 

Les puissances nécessaires imposent des prix d'installation importants. Dans le cas de la chaudière à pellets, il faut en plus installer le système de stockage et d'alimentation automatique en pellets. La figure ci-dessous compare les montants à investir pour chaque hypothèse :

 Comparaison des investissements

Comparaison des investissements inserts bûches, chaudière fuel, PAC, chaudière pellets (version Archimist Premium)

 

Les investissements en matériaux sont identiques pour tous les scénarios car seul le système de chauffage change. L'investissement passe d'environ 2000 € dans le cas des inserts à bûches, à plus de 20.000 € pour la chaudière à pellets, soit un rapport de 10.

Il est impossible d'amortir la chaudière à pellets par rapport aux inserts à bûches. En effet, le coût de fonctionnement est du même ordre, voire légèrement supérieur dans le cas de la chaudière à pellets. Par contre, si l'on compare la chaudière à pellets à la chaudière fuel, l'investissement est amorti en 13 ans et demi. La figure suivante fait la synthèse des trois scénarios centralisés (fuel, PAC, chaudière pellets), comparés au scénario à bûches:

Courbes d'amortissement fuel - pac - pellets

Fuel, PAC, Pellets comparés aux bûches (version Archimist Premium)

 

Quatrième scénario : à la recherche d'un compromis

L'idéal serait de pouvoir combiner l'automatisme du système fuel avec le coût de fonctionnement des inserts à bûches. Un scénario de compromis est alors élaboré : relayer les inserts à bûches par un chauffage central au fuel uniquement en cas d'absence et pour chauffer la chambre en remplacement du radiateur électrique. En fonctionnement normal  les inserts à bûches assurent l'essentiel du chauffage, ce qui permet de minimiser le coût de fonctionnement. Le système fuel prend le relais en fin de nuit et en cas d'absence prolongée. La chaudière fuel fonctionne en basse température, et le nombre de radiateurs est moins important que dans le cas du fuel seul. La figure suivante  montre les résultats obtenus (en vert), comparés aux autres scénarios :

 Scénario de compromis

Scénario mixte fuel + bûches comparé aux autres (version Archimist Premium)

 

Ce scénario de compromis est intéressant. Il correspond bien aux objectifs des propriétaires, mais est il robuste? Que se passe t'il si l'on prend en compte l'évolution du prix des énergies, et notamment du fuel?

La réponse à cette question est donnée par la figure suivante, où l'on a, par exemple, simulé une évolution du prix des énergies :

  • 7 % par an pour le fuel
  • 5 % pour l'électricité
  • 4 % pour les pellets
  • 3 % pour le bois bûches

Evolution du prix des énergies

Prise en compte de l'évolution du coût des énergies (version Archimist Premium)

 

La solution retenue

Avec ce scénario d'évolution du prix des énergies, la solution mixte : inserts à bûches + chauffage central fuel en appoint reste une solution viable pour les 20 ans à venir. C'est le scénario qui a d'ailleurs été retenu par les propriétaires. La solution PAC n'est pas loin derrière, et si le prix du fuel s'envolait dans le futur, il serait toujours possible de raccorder une pompe à chaleur de faible puissance en relève de la chaudière fuel. La chaudière fuel étant alors uniquement utilisée en cas de grand froid.

Le tableau de la figure suivante décrit le devis d'investissement du système de chauffage retenu:

 Devis chauffage

Devis d'investissement pour un système combiné fuel + bûches (version Archimist Premium)

 

La chaudière fuel et les radiateurs sont d'occasion. Le prix de la chaudière inclut le montage du réseau hydraulique (chaudière seule :  500 €). La figure suivante représente le tableau de consommation par type d'énergie : 

 

Coûts de consommation par type d'énergie

La consommation électrique est générée par le radiateur de la salle de bains. En comparant ce tableau avec le tableau suivant, qui montre la consommation du scénario à inserts à bûches + radiateur bain d'huile dans la chambre, on s'aperçoit que la consommation en bûches est à peu près équivalente. Le fuel a principalement pris le relais de l''électrique pour chauffer la chambre, et a marginalement complété les inserts à bûches.

 

En guise de conclusion provisoire

La conclusion ne peut en effet être que provisoire car les prix et les caractéristiques des systèmes évoluent en permanence. Mais on peut en tous cas en tirer la conclusion que le critère du temps de retour sur investissement doit être regardé de près sous peine de voir son matériel obsolète avant même de l'avoir amorti. On peut aussi en conclure, de façon tout aussi provisoire, qu'il vaut mieux regarder à deux fois avant de brader sa chaudière fuel récente pour une pompe à chaleur et son crédit d'impôt !